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Marie Madeleine
Quand Marie se fait Madeleine,
Elle s’affranchit de toute pudeur,
Un verre ou deux au bar de l’Éden,
Elle n’est pas contre un peu de chaleur.
Le temps d’un tango endiablé,
Elle veut atteindre le septième ciel,
Avec un goût d’éternité,
Alouette de paradis artificiels.
Au commencement, y a son miroir,
Qui lui murmure
Au crépuscule, une robe noire,
Comme une armure
Et quand Madeleine se fait souvenir,
C’est en sépia qu’elle trouve refuge,
Au pied d’un pommier, rajeunir
Au pied de son lit, le déluge
Et chaque fois, elle se relève
La marche digne, le port altier
Héritière du chromosome Ève
En droite ligne depuis X années.
Au commencement, y a son miroir,
Qui lui murmure
Au crépuscule, une robe noire,
Comme une armure
Et quand le souvenir se fait parfum
Qu’est-ce qu’elle sent le bon le patchouli
À en oublier les matins bruns,
Dès le premier pas, au saut de son lit.
Les serpents sifflent sur sa tête,
Elle en fait fit, sans trompettes.
Et choisit la soie à la laine
Quand Marie se fait Madeleine.
Au commencement, y a son miroir,
Qui lui murmure
Au crépuscule, une robe noire,
Comme une armurevotre commentaire
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Comme une bulle de savon
Parfois, quand vient le soir, quand ma tête repose,
Je vois sortir de l’ombre une foule de mots
Qui s’animent bientôt dans un joyeux chaos
Pour venir défiler sous mes paupières closes.
Les voici qui tournoient en une farandole
De phrases bariolées qui cherchent à rimer
Puis s’alignent enfin en vers bien ordonnés
Suspendus dans le vent sous une lune folle.
Doux sommeil, te voilà ! Regarde le poème
Qu’ont accroché pour moi les mots sous l’astre blême ;
Il ne me reste plus qu’à le cueillir sans bruit.
Alors, tout doucement, ma plume imaginaire
S’efforce d’attraper ce sonnet éphémère
Qui dans un discret « pop » éclate dans la nuit.votre commentaire
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Le monstre
Paul est terrorisé car un monstre effroyable
Tournoie autour de lui depuis deux jours entiers.
Il a beau se sauver, l’autre est si détestable
Qu’il ne le lâche pas. Un monstre sans pitiéIgnorant qu’il peut être un pur anxiolytique
Pour le pauvre garçon ; que cette inimitié
Est issue d’autrefois, de ces temps archaïques
Où il savait tout juste à peine balbutier.C’est depuis lors que Paul éprouve cette crainte,
Sans qu’il sache pourquoi. Un souvenir enfui
De ses rêves d’enfant ? Bien ridicule empreinte
D’un passé inconnu qui lui a toujours nuiTant il a l’air idiot quand l’ennemi s’approche,
Tournoyant sans pourtant se soucier de lui !
Un monstre inoffensif. Mais c’est vrai qu’il est moche,
Et que sa saleté proverbiale vous nuitDès qu’il vous prend pour cible : il est plein de microbes !
Pourtant Paul est viril ; et fort dur est son cuir !
Alors qu’est ce gredin suscitant tant d’opprobre,
Tellement écoeurant qu’il peut le faire fuirTout au fond de l’Enfer jusqu’à ce qu’il s’y perde ?
Ce monstre terrifiant ? C’est une mouche à merde !votre commentaire
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En octobre, à Marseille.
En octobre à Marseille il y a quelque chose
Qui l’affecte et le navre, et il flotte dans l’air
Des relents d’amertume, Evidence morose
Que l’été est fini et que s’en vient l’hiver.La mer est délavée et les jours raccourcissent.
Le soleil tôt couché se mue en cercle ombreux,
Effacé lentement par le vent qui s’immisce
En bouboulant* tout doux jusqu’au cœur ténébreuxDes ruelles pentues dévalant des collines.
Le seul talent du vent, c’est qu’il laque le ciel
D’un bleu dur purifié et presque artificiel,
Avec parfois le soir des touches violine.Il faut donc espérer que les arbres jaunissent,
Que le temps moribond pointille d’orangé.
De cuivre et de doré leur feuillage effrangé
Pour que nos lourds regrets peu à peu s’aplanissent,Pour enfin retrouver quelque charme à l’automne !
Mais la ville ressemble à ces villes du Nord
Dont le ciel défraîchi est d’un gris presque atone,
Où le soleil oublie qu’il irradie de l’or…A Marseille, en octobre, rôdent la nostalgie
Et l’absurde désir de l’été qui n’est plus,
Dont l’automne maussade a détruit la magie.
Les longs jours de l’été sont des jours révolus…votre commentaire
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La prière au Printemps
J’aimerais tellement qu’en ce presque printemps
Tous les gens soient heureux ; que pour un temps le temps
Ralentisse sa course effroyable, ou qu’il cesse,
Un peu plus adouci, d’accroître la détresseDe ceux qui sont au bout d’un bien trop court destin ;
Qu’il les aide à jouir de tous ces frais matins
Où le soleil repeint de ses doigts d’or les roses,
Quand il sait embraser en tous lieux toute chose,Aussi frais et pimpant qu’un jeune damoiseau ;
Rien n’y est plus charmant qu’entendre les oiseaux,
Revigorés de neuf par la saison nouvelle,
Siffloter au matin leur jolie ritournelleQuand les fleurs rénovées entonnent leur doux chant
Vibrant et coloré ; quand les bois et les champs
Se pointillent de vert dans la blanche lumière
Effaçant sous ses rais tout un monde de pierre :Et puis je voudrais tant, je voudrais tellement
Que le temps ne sépare jamais les amants !
Qu’il n’y en ait point trop que le printemps oublie
Dans leur triste parcours que la mélancoliePeint en noir et en gris tant ils se sentent seuls ;
Que le soleil tout neuf embrase le linceul
Où ils sont enfermés d’un geyser d’étincelles
Pétillant de bonheur, fusant en ribambelles…votre commentaire
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Il ne pleut pas
Il ne pleut pas, il pleure ! Et Marseille est bien triste
Sous son bonnet mouillé de nuées poivre et sel.
Il bruine sur la mer qu’un sombre coloriste
A peint couleur de l’eau qui s’égoutte du ciel.La grand’ville du Sud n’est pas habituée
A ce rideau brumeux qui voile l’horizon ;
Car prête à tout pour lui, c’est en prostituée
Qu’elle aime son soleil jusqu’à la déraisonTant il semble sensible à sa rude misère.
La pluie la défigure en faisant ressortir
La hideur de ses murs, que des tags éphémères
Tentent de décorer ! Mais lui sait revêtirSes vieux quartiers pouilleux d’une blanche lumière
Dissimulant ses plaies… Maintenant ils sont gris,
Et même le Vieux Port a un aspect austère
Sous ce crachin fangeux et mou qui contrarieLes touristes venus visiter la Provence.
Il y pleut sans arrêt depuis un mois entier,
Et tous les Marseillais maudissent la malchance
Qui a fait de leur ville un immense bourbier.Il faut bien concéder que l’automne galège,
Se prenant tout à coup pour un quasi-hiver.
Mais soudain tout se tait : il ne pleut plus, il neige !
Marseille a-t-il donc fait incursion en enfer ?votre commentaire
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La malice des choses
Les objets depuis peu me jouent pas mal de tours
En se carapatant : il n’y a pas un jour
Sans que l’un d’eux, le con* ! cherchant à me narguer,
Ne décide soudain de s’enfuir et fuguerDans un coin incongru ! Exprès pour m’humilier…
Ou perdrais-je l’esprit, soudain folle à lier,
En ne retrouvant plus portable ni lunettes ?
Pourquoi veulent-ils donc m’embarbouiller la tête ?Je les dépose ici, je les retrouve là.
Comme clés et papiers… Pour y mettre un holà,
Je dois faire attention ; devenir intraitable
Envers leur perfidie ; les poser sur la table,En mémorisant bien à quel endroit ils sont.
Mais dès que je m’en vais, ces fichus polissons
Décelant mon départ plient aussitôt bagage.
A moins que ce ne soit Vette qui… déménage !* Si vous êtes un peu puritain, je ne vous empêche pas de changer ce joli mot, bien dru, bien franc du collier, par un autre plus édulcoré : « l’idiot » par exemple ? Hum, j’aime mieux le mien…
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Pourquoi le temps
Quand elle fond, où va la neige ?
Où vont les mots quand ils sont dits ?
Le temps qui passe et qui allège
Toute peine, où s’est-il enfui ?Et pourquoi donc toute minute
Est-elle passé ou futur ?
Pas de présent, ce temps obscur
Qui finit alors que débuteUn autre instant déjà fini !
Pourquoi ce temps insaisissable
Rend-il les choses périssables
Bien qu’il soit lui-même infini ?Pourquoi es-tu si important
Alors que tu n’es que poussière ?
Une parcelle de lumière,
Mais un rien du tout pour le Temps !La vie qui fond, où s’en va-t-elle ?
Où sont donc tous ces jours passés ?
Tous ces souvenirs ressassés
Et qui s’enfuient à tire d’aile ?votre commentaire